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27 novembre 2013 3 27 /11 /novembre /2013 12:39

ainsi_resonne_lecho_infini_des_montagnes_khaled_hosseini.jpgExercice difficile que de parler du dernier roman de Khaled Hosseini tant il est riche. Une foison de personnages, de lieux, de thèmes caractérisent ce grand roman-puzzle à la construction originale et intelligente.

Ainsi résonne l’écho infini des montagnes nous raconte l’histoire de 3 enfants demi-frères et sœurs séparés très tôt. On suit le destin de chacun tout au long de leur vie mais à travers l’histoire de personnages tiers.

Le roman s’ouvre sur un conte afghan qui annonce les évènements à venir. Suivent ensuite 5 parties toutes relatives à l’histoire d’un personnage particulier par le biais duquel Khaled Hosseini nous offre des informations sur nos protagonistes principaux.

C’est donc à l’image de la vie de Pari et Abdallah, deux frères et sœurs très tôt arrachés l’un à l’autre, que Khaled Hosseini construit et ordonne son récit.

 

« Mais c’est important de connaître tes racines et l’endroit où tu as commencé à exister en tant qu’être humain. Sinon, ta vie paraît irréelle. Pareille à un puzzle. Tu comprends ? Comme si, après avoir raté le début d’une histoire, tu te retrouvais soudain au milieu, à essayer de tout démêler. 

  J’imagine que c’est ce que ressent Baba ces jours-ci. Une vie parsemée de trous. Tous les jours une histoire déroutante, un puzzle à reconstituer à grand-peine. »

 

Donc petit conseil : ne vous attachez pas dès le début aux personnages. C’est l’erreur que j’ai commise influencée par ma lecture récente des Cerfs-volants de Kaboul. Je m’attendais à une narration d’un genre identique où l’on suit un même personnage tout au long du roman. Mais ici Khaled Hosseini a procédé tout autrement.

 

On voyage ainsi en Afghanistan bien sûr mais aussi aux Etats-Unis, en Inde, en Grèce, en France. Et derrière ce semblant de diversité, les mêmes préoccupations, les mêmes thèmes de réflexion reviennent, abordés tour à tour sous un angle différent.

Tout comme dans Les cerfs-volants de Kaboul, on retrouve le thème des relations fraternelles : de l’attachement avec Abdallah et Pari mais aussi de la jalousie comme l’illustrent les rapports entre Parwana et Masooma ou encore les deux cousins Timur et Idris.

Les rapports enfants-parents sont aussi développés comme avec Adel et son père ou encore Pari et ses parents.

 

Mais le thème qui m’a le plus marquée est celui du handicap. Qu’il soit causé par accident comme c’est le cas de Masooma et de Thalia ou par la vieillesse et la maladie comme Abdallah et Suleiman, Khaled Hosseini étudie l’impact du handicap sur les mentalités, les comportements humains et montre quelles sont les différentes réactions possibles. Là encore, on se rend compte que quelque soit l’attitude adoptée par les personnages concernés, aucune ligne de conduite ne peut être jugée ou condamnée, qu’ils choisissent le sacrifice comme Nabi et Pari ou la fuite à l’instar de Parwana et Markos.

 

« Devant la tendresse et la légère panique perceptibles dans ses paroles, j’ai compris que mon père était quelqu’un de blessé, que son amour était aussi vrai, aussi vaste et immuable que le ciel, et aussi que cela pèserait toujours sur moi. C’était le genre d’amour qui tôt ou tard vous obligeait à faire un choix : soit on s’arrachait à lui pour être libre, soit on restait et on supportait sa dureté alors même qu’il cherchait à vous faire entrer de force dans une case trop petite pour vous. »

 

Ce roman est donc une véritable merveille. Khaled Hosseini m’a vraiment impressionnée. Il démontre tout son talent de conteur, d’observateur des comportements, d’analyste des relations humaines. Là encore, il nous raconte son pays d’origine, les mentalités du peuple afghan et , cette fois, évoque la toute puissance des narco-trafiquants : les nouveaux seigneurs exerçant grâce à leur fortune leur emprise sur les régions rurales du pays.

Il parvient à retranscrire des atmosphères aussi diverses soient-elles, fait passer des émotions, étudie de façon simple mais minutieuse les travers de l’homme et notamment, comme dans Les cerfs-volants de Kaboul, la lâcheté. Les personnages sont nombreux mais, pour tous, leur psychologie est travaillée dans le détail. Il n’y a rien de superflu. En peu de mots, Khaled Hosseini réussit à dire et transmettre beaucoup de choses. Il nous fait entrer dans la tête des personnages, nous fait partager leurs pensées, leur façon de raisonner. Ce qui fait qu'on comprend parfaitement leur comportement et qu'on ne peut les juger.

Il multiplie aussi les procédés narratifs, tantôt narration à la 3ème personne, tantôt à la première, narration épistolaire, extrait d'interviews. Et malgré toute cette variété, le lecteur ne s'y perd jamais car tout est lié, que le lien soit un personnage, un évènement, une photo. Les ponts entre chaque récit sont nombreux, logiques. L'ensemble forme un tout cohérent sans aucune fausse note.

Même si les émotions ont été pour moi moins fortes que lors de ma lecture des Cerfs-volants, la construction, la richesse et la maîtrise de ce dernier roman sont remarquables.

 

J’aurais encore beaucoup de choses à dire, beaucoup d’extraits à présenter mais l’éternelle peur du spoiler me fait m’arrêter ici. Je ne peux que vous conseiller très chaudement la lecture de ce très grand roman. Je suis contente d’avoir encore Mille soleils splendides à lire même si je pense que j’aurai du mal à en retarder davantage la lecture. Khaled Hosseini publie au compte-gouttes et il me faudra m’armer de patience une fois ses trois romans engloutis. Mais comme chacun sait, ce sont les choses les plus rares les plus précieuses.

 

Un immense merci à Elsa de la société Athomédia et aux éditions Belfond pour leur intérêt, leur confiance et pour m’avoir permis ce sublime voyage autour du monde et dans les tréfonds de l’âme humaine.

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1 novembre 2013 5 01 /11 /novembre /2013 12:19

hosseini.jpg

 

On suit Amir, fils d’un homme d’affaires aisé de Kaboul. Amir est assez introverti, son principal compagnon de jeu est Hassan, le fils du domestique. Mais Hassan est issu du peuple hazara haï par les pachtounes qui ont tout fait pour purger le pays de cette ethnie. Du fait de sa condition, Hassan est analphabète et Amir profite de sa position de force dans ses rapports avec le petit garçon. Il faut dire que le père d’Amir semble éprouver plus d’affection pour Hassan que pour son propre fils. Afin d’obtenir l’estime et l’amour de son père, Amir va jusqu’à commettre un acte honteux qui le hantera toute sa vie jusqu’à ce que, une fois adulte et exilé en Amérique, l’occasion lui soit donnée de se racheter. Amir retourne en Afghanistan et constate l’effroyable métamorphose qu’a subie son pays d’origine à présent sous la coupe des talibans.

 

Quel magnifique roman ! Certes, le style est assez simple mais l’histoire qu’il raconte est tellement émouvante que j’en ai pleuré. Il retrace particulièrement bien l’histoire contemporaine de l’Afghanistan et offre le point de vue d’un afghan ayant vécu les évènements. C’est particulièrement intéressant et bouleversant.

 

kabul-1970_223_l2.jpg

Kaboul en 1970

 

C’est aussi un joli conte avec pour thème principal le rachat de ses fautes mais aussi la culpabilité et les rapports père-fils.

J’avais très peur au début d’avoir affaire à un énième pamphlet anti-islam mais pas du tout. L’auteur a su rester objectif et a su traiter de la progressive évolution de Amir sur le chemin de la Foi sans écarter d’autres points de vue comme l’illustre la figure du père de Amir. Il a également montré que les talibans n’étaient que des hypocrites qui, sous couvert de l’islam, ne recherchaient que le pouvoir.

On apprend donc beaucoup sur l’Afghanistan, comment les évènements tragiques que ce pays a connu ont été vécus, mais aussi sur les mœurs et les traditions des afghans.

 

J’ai aussi visionné l’adaptation ciné et je me suis alors rendue compte à quel point Khaled Hosseini avait bien construit ses personnages et son intrigue. En utilisant la première personne du singulier, il nous fait partager les pensées de Amir. Et c’est ce qui fait cruellement défaut au film, on a souvent l’impression de passer du coq à l’âne et qu’il manque des informations  en particulier au sujet des relations entre Amir et Hassan et entre Amir et son père.

 

amir-et-hassan.jpg

 

L’évolution de la psychologie des personnages est bien plus visible et détaillée dans le livre. C’est un roman très bien maîtrisé de bout en bout, une petite merveille.

Je suis donc enchantée par ma lecture et je prévois très bientôt de lire Mille soleils splendides qu’on m’a beaucoup vanté.

 

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20 janvier 2013 7 20 /01 /janvier /2013 14:34

les-filles-d-allah.jpgIntriguée par le titre, j’ai mis un petit moment avant de me laisser tenter par ce roman ne sachant pas trop à quoi j’aurais à faire. Les critiques lues ça et là m’ont enfin décidée à me lancer.

Nedim Gürsel nous livre là un roman en partie autobiographique dans lequel il se remémore son enfance, les contes que lui narrait sa grand-mère, la Foi que lui transmettait son grand-père, ses jeux et ses interrogations partagées avec son ami Ismaïl.

Le tout forme un roman assez complexe et riche qui nécessite une certaine curiosité envers la religion musulmane. Car en effet, le texte est parsemé de références à l’Islam, nous dévoilant quelques histoires qui se cachent derrière des sourates du Coran, nous racontant en partie la vie du prophète, sa naissance, ses mariages, la révélation, les combats contre les Mecquois. Puis, à l’occasion, l’auteur revient à ses souvenirs mais surtout à ceux de son grand-père offrant ainsi au lecteur le récit des combats des ottomans contre les anglais et les arabes soutenus par le célèbre Lawrence d’Arabie.

 

Le style est simple et poétique même si le genre de narration employé peut surprendre au début. L’auteur s’adresse à lui-même enfant utilisant ainsi en majorité la 2ème personne du singulier. Il fait toutefois une exception lorsqu’il s’amuse à faire parler « les filles d’Allah », ces idoles vénérées par la tribu des Qoraïch avant que Muhammad ne reçoive la Révélation.

 

Bien que l’idée soit originale, je n’ai pas compris pourquoi l’auteur s’y était pris de cette façon, pourquoi faire de ces statues des « filles » d’Allah que Celui-ci aurait par la suite reniées ? C’est totalement contradictoire avec le précepte fondamental sur lequel repose l’Islam : l’unicité de Dieu et le fait qu’Il n’a pas engendré ( réfutant ainsi la croyance des chrétiens en un Jésus fils de Dieu). Cette incohérence est plutôt dommage ( l’intention de l’auteur a du complètement m’échapper) car les passages relatifs à ces idoles sont plutôt amusants, on connaît leurs pensées et leurs réactions face à la progressive conversion des Qoraïch à l’Islam, tantôt séduites par le prophète au point de jalouser ses femmes, tantôt haineuses et réclamant le sang. Alors peut-être que ce sont des légendes ? Peut-être se racontait-on ces histoires ainsi ? Ou est-ce pure invention de l’auteur ? J’avoue qu’il est difficile pour le lecteur de faire la part des choses et que ça reste du coup un peu confus.

 

J’ai trouvé intéressant l’idée de romancer la vie du prophète, j’ai beaucoup apprécié les anecdotes relatives à ses relations avec ses femmes, les jalousies et les mesquineries dont elles étaient capables. Tout aussi intéressant est le parallèle effectué par l’auteur entre la guerre Ottomans/Arabes et la guerre Mecquois/Médinois avec toutes les interrogations que cela suscitait chez le grand-père de l’auteur : comment Arabes et Turcs pouvaient-ils se faire la guerre alors qu’ils sont frères en Islam ?

 

C’est donc un joli texte que nous propose Nedim Gürsel où la petite et la grande histoire se mêlent aux contes et aux légendes, où les souvenirs refont surface peut-être pour mieux souligner l’évolution d’un enfant élevé dans la Foi et devenu un adulte qui a pris ses distances avec la chose religieuse à l’image de cette Turquie actuelle qui se cherche entre tradition et modernité.

 

Après recherches sur la toile, j’ai appris que, à la parution de ce roman, Nedim Gürsel avait été en procès avec les autorités turques pour avoir «vilipendé publiquement les valeurs religieuses d'une partie de la population», un délit qui peut «menacer la paix sociale ». Je n’ai pas eu le détail complet de ce qui lui était reproché mais étonnamment ce n’est pas ce à quoi je m’attendais. Apparemment, le fait d’avoir romancé la vie du prophète pose problème. Je ne comprends pas pourquoi dans la mesure où ça contribue plutôt à diffuser une bonne image de lui et à mieux le faire connaître. La preuve : j’ai appris beaucoup de choses grâce à ce roman et il m’a donné envie d’en savoir encore plus.

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5 janvier 2013 6 05 /01 /janvier /2013 22:35

maalouf.gifPrésentation de l’éditeur :

 

"Le destin passe et repasse à travers nous, comme l'aiguille du cordonnier à travers le cuir qu'il façonne." Pour Tanios, enfant des montagnes libanaises, le destin se marque d'abord dans le mystère qui entoure sa naissance : fils de la trop belle Lamia, des murmures courent le pays sur l'identité de son vrai père. Le destin passera de nouveau, dans ces années 1830 où l'Empire ottoman, l'Egypte, l'Angleterre se disputent ce pays promis aux déchirements, le jour où l'assassinat d'un chef religieux contraindra Tanios à l'exil... Mêlant l'histoire et la légende, la sagesse et la folie des hommes, le romancier de Léon l'Africain et du Premier Siècle après Béatrice nous entraîne dans un prodigieux voyage romanesque qui lui a valu le prix Goncourt 1993.

 

 

Mon avis :

 

A cours de livres pendant mes vacances de fin d’année, je me suis rabattue sur la bibliothèque de mon papa qui a la merveilleuse habitude de collectionner les prix Goncourt. Ne connaissant toujours pas Amin Maalouf, j’ai donc jeté mon dévolu sur Le Rocher de Tanios.

Et je ne le regrette absolument pas !

 

La construction du récit est originale, la plume de l’auteur est fluide et sans fioritures et le sujet ne pouvait qu’attiser ma curiosité.

Dès les premières pages, le lecteur mord à l’hameçon que lui tend Amin Maalouf : d’où vient donc cette étrange légende qui interdit à quiconque de s’asseoir sur le rocher de Tanios sous peine de disparaître ?

C’est ce que le narrateur va chercher à savoir. S’appuyant sur la mémoire d’un ancien du village et sur des documents historiques, il fera revivre l’histoire de son village au XIXème siècle. Attention car l’auteur précise bien que ces sources historiques et la légende en question sont purement fictives bien que le récit soit basé sur un fait réel. Mais pourtant, le talent de l’auteur fait que l’on y croit malgré tout.

 

J’ai donc été charmée par ce roman aux allures de conte avec en toile de fond le conflit entre l’empire ottoman et l’Egypte, conflit arbitré par les puissances européennes qui cherchent leur part de gâteau. L’influence britannique et sa concrétisation sur le terrain dont Amin Maalouf nous dévoile certains aspects est particulièrement intéressante. Les enjeux de pouvoir et la lutte entre les différentes hiérarchies de la politique locale sont expliquées de façon très simple et j’ai beaucoup apprécié cette imbrication du récit fictif dans un contexte historique réel. Sous ses allures de conte , c’est donc une parcelle de l’histoire du Liban qu’illustre ce roman.

 

Les personnages sont attachants et tous profondément humains, l’importance accordée à l’honneur est bien mise en évidence et sert de fil rouge tout au long du récit, chaque personnage cherchant à le défendre et à garder tête haute en toutes circonstances mais est contraint malgré lui de subir son destin et les épreuves qu’il lui impose. Quête d’identité, amour et exil attendent Tanios et bien d’autres personnages. C’est donc aussi toute la mentalité d’un peuple attaché à ses croyances, à ses traditions et à sa terre qui nous est montrée que ce soit dans ses travers ou dans sa grandeur.

 

Le roman est court et s’engloutit rapidement. Une fois en main, j’ai eu du mal à le reposer prolongeant ma lecture jusqu’aux petites heures du matin.

Bref c’est un très beau voyage auquel nous invite Amin Maalouf et je suis prête à repartir en sa compagnie à tout moment.

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20 novembre 2012 2 20 /11 /novembre /2012 14:32

DSC01808.JPGQui n’a jamais entendu parler des aventures de Sindbad le marin, du génie de la lampe d’Aladdin , qui ne connaît pas le célèbre mot de passe permettant l’accès au trésor des 40 voleurs ?

Etrangement, ces contes les plus populaires et les plus célèbres des Mille et Une Nuits ne font pourtant pas partie des contes originaux.

En effet, à l’origine, les Mille et Une Nuits seraient des contes issus de la tradition orale indienne qui seraient parvenus jusqu’en Perse où des chercheurs ont relevé dans un ouvrage la mention d’un manuscrit intitulé Hezar Efsane ( les Mille contes) pourtant jamais retrouvé.

 

Par l’intermédiaire des marchands perses et arabes, ces contes auraient été progressivement transmis de façon orale toujours de génération en génération pour égayer les nuits lors de longs voyages jusqu’à ce qu’ils soient enfin mis par écrit aux environ du XIIIème siècle. Au cours du temps, les arabes auraient ajouté au corpus initial de nombreux autres contes mêlant ainsi éléments indous, persans et donc arabes donnant ainsi leur exotisme et leur charme tout oriental aux Mille et Une Nuits.

 

Au tout début du XVIIIème siècle, Antoine Galland prend l’initiative de traduire ces contes et d’en faire la version des Mille et Une Nuits que j’ai eu entre les mains. Plus qu’un travail de traduction, Galland s’est permis aussi de réécrire les contes, édulcorant certains passages pour ne pas heurter la sensibilité de ses compatriotes, supprimant Antoine_Galland.PNGtous les poèmes et toutes les fables et ainsi que d’autres passages qu’il a jugé ennuyeux, utilisant un style raffiné et réagençant l’ordre des nuits qui ne correspond donc pas à l’ordre original. C’est également à lui que l’on doit l’ajout des contes de Sindbad (fortement inspiré de L’Odyssée d’Homère), d’Aladdin et d’Ali Baba.

 

J’ai beaucoup apprécié ce premier tome des Mille et Une Nuits. La construction du récit est diabolique puisqu’elle rend la lecture très addictive. Le lecteur se retrouve dans la même position que le sultan Shahriar et, dévoré de curiosité, ne peut s’empêcher de tourner les pages pour connaître la suite. Parce que, bien sûr, Schéhérazade arrête toujours son récit à des moments cruciaux.

On voyage énormément grâce à ces contes, on se trouve tantôt à Bagdad, tantôt en Inde, ou encore au Caire ou même à Damas, ce qui illustre parfaitement la pluralité de leur origine.

Mais bien que le cadre géographique invite à l’exotisme, j’avoue que le style très « France du XVIIIème » de Galland m’a empêchée de m’abandonner au rêve. C’est une langue qui ne colle pas du tout au cadre. A l’origine, les contes ont été retranscrits dans un langage populaire ( ce qui les a d’ailleurs longtemps discrédités aux yeux des lettrés arabes). Galland a donc voulu adapter le style à un public occidental ayant accès à la littérature ( la haute société donc), alors certes c’est très agréable à lire mais comme je le disais on ressent un décalage entre le fond et la forme.

Au sujet de la forme, l’originalité de ce recueil est aussi la construction en mise en abîme où les différentes histoires s’emboîtent les unes dans les autres à la façon des poupées gigognes. Ainsi, l’histoire du petit bossu en comprend 4 autres dont l’une d’elles en comprend 2 dont l’une en comprend 6. Mais je vous rassure ! On ne perd pas du tout le fil !

 

1001-nuits-image.jpg

 

Concernant le fond enfin, bien que certains éléments et thèmes soient récurrents, on ne s’ennuie pas une seconde. Certains contes sont même parfois drôles (je pense notamment à celui du bossu et au barbier) et riches en péripéties

avec de nombreux voyages, des rencontres extraordinaires de serpents géants, de sauvages anthropophages, d’autres monstres et animaux fabuleux. Le monde des Mille et Une Nuits est vraiment plein de magie et nous fait retrouver cet enfant enfoui en nous prompt à s'émerveiller de tout et qui nous manque tant dans notre vie d'adulte responsable.

Il y a des personnages types comme les djinns, les fées, tantôt bienfaisants tantôt le contraire, le sultan toujours paré d’une même vertu : la miséricorde, le prince ou le pauvre homme à qui il arrive une succession de malheurs mais pour qui tout se termine toujours bien.

Les contes ont un certain côté moralisateur puisque souvent les personnages ne doivent leurs malheurs qu’à des défauts propres à la nature humaine tels que la cupidité, la curiosité, la jalousie etc… Mais toujours, et c’est vraiment récurrent, deux vertus s’imposent parmi toutes les autres : la générosité et le pardon. Le méchant est plus souvent pardonné que puni.

Parmi toutes les histoires de ce premier tome, j’ai préféré celle des Trois Calenders, celle de Noureddin Ali et j’avoue que celle du Bossu est plutôt bien partie (mais malheureusement la fin est dans le 2ème tome).

Je crains beaucoup l’effet de répétition et donc de lassitude aussi je vais attendre un peu avant de lire la suite mais j’ai vraiment passé un très agréable moment à lire ces merveilleux contes.

 

Si vous souhaitez lire les Mille et Une Nuits, renseignez-vous bien sur les différentes traductions et éditions. J’ai lu que certaines n’étaient même pas présentées par nuits mais par histoires. De même, ma version de Galland ne compte pas 1001 nuits mais uniquement 237 et d’ailleurs le 3ème tome n’est plus présenté selon les nuits mais ne comporte que les histoires ( Schéhérazade est tombée aux oubliettes). Il me semble qu’il existe une traduction toute récente (parue à La Pléiade) qui, elle, comporte toutes les nuits (sauf erreur de ma part) et respecte l’ordre et le style d’origine.

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3 septembre 2012 1 03 /09 /septembre /2012 17:54

la femme qui-copie-14ème de couverture :

 

Téhéran, seconde moitié du XIXe siècle : la cour du shah fourmille d'intrigues de palais, complots et autres tentatives d'assassinat plus ou moins abouties, sous l'ironique et cruel regard de la mère du souverain persan... Voici que cette fois, pourtant, ce très ancien royaume va se trouver ébranlé non tant par les menées factieuses des uns ou des autres (menées qu'observe l'ambassadeur de Sa Royale Majesté la reine d'Angleterre) mais par l'irruption inattendue d'une poétesse fort lettrée dont, d'un bout à l'autre du territoire, les vers et les propos semblent agir sur quiconque en prend connaissance comme de puissants catalyseurs d'énergies "subversives" - voire "hérétiques" : entre ces deux adjectifs, que certains sont tentés de rendre synonymes, reste à savoir qui, de la poésie ou de la violence, va trancher... A travers la figure historique de la poétesse Tahirih Qurratu'l-Ayn, à laquelle la postérité se montra si peu soucieuse de rendre justice, et qui osa, en femme libre et en exceptionnelle rhétoricienne, affronter au péril de sa vie les tenants du pouvoir tant séculier que théologique de son temps, Bahiyyih Nakhjavani met en scène les enjeux éternels - et plus incandescents que jamais aujourd'hui - de la liberté d'expression dès lors qu'elle s'affronte aux puissants comme aux dogmes religieux. Ecrit dans une langue étincelante, qui croise subtilement les fils de l'Histoire, de la religion, de l'art et la question de la condition féminine, ce roman propose, sur le mode d'une fiction historique, une réflexion d'une indéniable actualité.

 

Mon avis :

 

Après lecture de la 4 de couv, je me faisais une joie de découvrir le destin de cette femme qui osa braver les interdits et la domination des mollahs.

Mais finalement, tout ce qu’il y avait à retenir est contenu dans les 5 pages que constituent la post-face et la chronologie présentée en fin d’ouvrage.

 

Je me suis terriblement ennuyée pendant cette lecture qui a été longue et pénible. La première chose qui m’ait perturbée est le fait qu’aucun des personnages n’est nommé par son nom. L’auteur utilise à la place des qualificatifs tels que «  l’épouse du maire », « la fille de la poétesse », « la mère du shah », jamais ces personnes ne sont nommées directement. Heureusement qu’il y a la chronologie à la fin pour savoir de qui on parle exactement (tout le monde n’est pas forcément au point sur l’Histoire de l’Iran !). Parfois, je ne m’y retrouvais absolument plus, je ne savais plus de qui l’auteur parlait, j’étais obligée de revenir plusieurs lignes en arrière et de relire, parfois sans succès.

Je ne comprends pas du tout pourquoi l’auteur a procédé ainsi. En plus, elle utilise le discours indirect en abondance ou le discours direct libre mais il n’y a aucun dialogue clairement marqué. Tout ceci contribue à une lourdeur et à une sensation de manque de relief. Ce récit ne vit pas , aucune émotion n’est transmise.

 

La construction est elle aussi très étrange. Le roman se découpe en 4 parties, chacune consacrée à évoquer une même histoire mais du point de vue d’une femme différente. La première partie est consacrée à la vision de la mère du shah, la deuxième à celle de l’épouse du maire, la troisième à celle de la sœur du shah et la dernière à la fille de la poétesse (quoique …). Et dans chaque partie, on a droit à des flash-backs incessants, il faut vraiment être bien concentré pour suivre !

 

Je m’attendais donc à une biographie romancée de Tahiri Qurratu’l-Ayn mais finalement seule la dernière partie du roman lui est véritablement consacrée. Les trois autres ne font que relater les déboires de la famille du shah avec la présence de la poétesse en toile de fond.

Alors certes, on a une description de la vie en Iran au XIXème siècle mais uniquement du point de vue des femmes et surtout des femmes de haut rang. Finalement, le portrait que l’auteur fait de la Perse de l’époque est d’une incroyable noirceur. Il n’y a rien de positif, à l’en croire, l’Iran de l’époque des shahs n’est que violence, complots, intrigues, médisances, mesquineries, mariages forcés, tortures, massacres, famines, assassinats et émeutes. On est loin des Mille et Une nuits et de la magie orientale. Que je suis contente d’être née en France au XXème siècle !!

 

J’aurais tout de même appris des choses grâce à cette lecture et notamment un pan de l’Histoire de l’Iran au XIXème siècle et surtout l’existence de Tahiri Qurratu’l-Ayn, du courage de cette femme, figure du féminisme en Orient, elle qui a osé retirer son voile en public, elle qui s’est battue pour que les femmes aient accès à l’instruction, qu’elles apprennent à lire, à écrire et à être enfin reconnues comme des êtres pensants et capables de réflexion à égalité avec les hommes. C’était une femme remarquable et son souvenir subsiste encore au sein du peuple iranien bien que l’Histoire officielle l’ait « oubliée ». La question du statut de la femme étant toujours d’actualité dans certaines contrées, les problématiques de ce roman en font un plaidoyer très moderne.

 

Mais bien que l’objectif et l’intention de cette œuvre soient très louables, le traitement trop confus et décousu du sujet n’a pas été à la hauteur de mes espérances. Dommage …

 

challengehist

 

 

 

Cette lecture compte pour le challenge Histoire de Lynnae.

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29 mai 2012 2 29 /05 /mai /2012 14:26

mandanipour4ème de couverture :

 

Je vais vous raconter l'histoire d'amour de Sara et Dara. Comment s'aimer en Iran, quand toute rencontre entre les deux sexes est proscrite? Rencontre interdite à vivre comme à écrire... Voilà également mon histoire d'écrivain, une histoire d'amour avec les mots, semée d'embûches. Car dans mon pays, lorsqu'il s'agit d'amour, toujours la censure veille... Ensemble, nous allons la déjouer!

 

Mon avis :

 

J’avais déjà repéré ce titre lors de sa sortie et puis il est sorti de ma tête jusqu’à ce que je le vois en format poche sur un des étals de ma librairie. Prise de doutes, je le repose. Une fois rentrée, je fais le tour des critiques, plutôt disparates mais l’avis de Keisha achève de me convaincre et je retourne à la librairie.

Une fois le précieux bien convoité entre mes mains, je m’y plonge aussitôt.

A présent je l’ai terminé et je n’ai qu’une envie : le relire.

J’ai vraiment adoré ce roman qui concentre en quelques 400 pages tout ce que j’aime dans la littérature.

 

L’objectif de l’auteur à travers ce roman est de nous montrer à quels problèmes lors de l’écriture est confronté un auteur iranien qui souhaite être publié dans son pays. Pour cela, Shahriar Mandanipour va se mettre lui-même en scène ainsi que le censeur M. Petrovitch ( oui oui, le juge chargé du cas Raskolnikov dans Crime et châtiment).

Les transformations opérées dans le texte sont rendues visibles : en gras le corps de l’histoire d’amour que l’auteur veut raconter, les passages susceptibles de ne pas passer la censure sont rayés, en forme normale les interventions de l’auteur, ses dialogues avec M. Petrovitch, le roman tel qu’il aimerait le raconter, les anecdotes et des tas d’autres petites choses intéressantes.

Vous l’aurez compris, le plus intéressant dans ce livre n’est pas l’histoire d’amour en elle-même mais la façon dont elle est racontée et pourquoi elle est racontée de cette façon et pas d’une autre. Shahriar Mandanipour ponctue donc son récit de nombreuses références littéraires notamment iraniennes ce qui nous permet de la découvrir dans toute sa subtilité où la symbolique est très importante. En Iran, la religion ne permet pas la proximité homme-femme telle que nous la connaissons chez nous. Les relations amoureuses se font en cachette et dans la littérature elles se cachent sous de nombreuses formes poétiques puisant dans les registres de la nature. Ce que Shahriar Mandanipour nous démontre à merveille en analysant pour nous quelques vers célèbres, le passage est d’une ironie mordante et on ne peut s’empêcher de sourire.

 

Outre la littérature iranienne, c’est aussi quelques pans de l’histoire du pays mais surtout des contes de grand-mère et des légendes que l’auteur nous fait découvrir pour notre plus grand plaisir. Ainsi vous connaîtrez la légende liée aux roses de Damas et vous ferez connaissance avec Shinin et Khosrow personnages très célèbres de la littérature iranienne grâce auxquels vous comprendrez pourquoi l’Iran, au cours de sa longue histoire, s’est toujours fait envahir.

En plus d’avoir un aperçu de la richesse de la culture iranienne, En censurant un roman d’amour iranien vous emmène au cœur du pays et vous fait partager le quotidien des iraniens jamais à court d’idées pour contourner les lois qui leur interdisent tout contact avec l’Occident ( que ce soit à travers la télévision, la musique, le cinéma, la littérature…) et toujours prêts à  échapper aux patrouilles de la Campagne contre la corruption sociale.

Par contre à ce sujet, je me pose quelques questions car d’après l’auteur hommes et femmes ne peuvent pas emprunter le même trottoir dans la rue, or ce n’est pas ce que j’ai vu dans les documentaires que j’ai visionnés en parallèle de ma lecture, de même j’y ai vu hommes et femmes aller dîner ensemble au fast-food…(s’il y a des iraniens parmi vous, je serai heureuse d’avoir leur point de vue sur la question).

 

Autre petite chose qui me rend perplexe, c’est ce fameux cadavre de nain bossu. Apparemment, il est une référence aux Mille et une nuits (il faut absolument que je les lise) mais du coup je n’ai pas compris …

Donc voilà, le récit est truffé de subtilités et de clins d’œil qu’il faut savoir repérer et décrypter pour pouvoir les apprécier. L’auteur s’amuse aussi avec son lecteur en s’adressant directement à lui et en anticipant ses réactions et ses questions. Il intervient lui-même dans son récit en interagissant avec ses personnages. Je sais bien que le procédé n’est pas nouveau mais j’adore ça quand même surtout que Shahriar Mandanipour est parvenu à me bluffer à plusieurs reprises et en particulier à la fin, une fin à laquelle je ne m’attendais absolument pas !

Bref En censurant un roman d’amour iranien est un petit bijou qui m’a fait rêver, voyager et rire aussi tellement certains passages sont comiques. L’auteur a réussi avec un grand talent à démontrer l’absurdité de la censure, système qui ignore complètement le pouvoir d’imagination du lecteur. Je me souviens d’un passage érotique que l’auteur a tenté de raconter sous plusieurs formes pour éviter la censure, certaines étaient ridicules mais une autre, tout en étant extrêmement imagée, était bien plus torride que si l’auteur avait utilisé des mots crus. Et que dire de ce que peuvent laisser croire les fameux et très utiles points de suspension …

 

J’ai lu que certains lecteurs avaient été gênés par le style. Il est vrai que la version française est une double traduction ( du farsi à l’anglais et de l’anglais au français). Personnellement, je tiens à saluer le travail des traducteurs car cela devait être extrêmement difficile, je n’ai pas du tout été gênée et j’ai déjà eu entre les mains des simples traductions qui, elles, étaient illisibles.

 

Donc voilà, un gros coup de cœur pour ce roman qui se veut récit engagé et conte oriental à la fois que je relirai très certainement ( et il en faut vraiment pour que je relise un livre !) et qui m’encourage à découvrir plus encore la littérature et la culture iranienne.

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