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21 juillet 2013 7 21 /07 /juillet /2013 17:13

DSC01825.JPGNivaria Tejera nous offre un bien joli texte nous décrivant le quotidien d’une famille des îles Canaries pendant la guerre d’Espagne, quotidien vu à travers le regard d’une petite fille, nous faisant part de ses inquiétudes, de ses angoisses, de ses interrogations face aux évènements qui viennent bouleverser son petit monde.

Petit à petit, la guerre s’immisce dans cette famille, son père est arrêté puis relâché. L’angoisse qu’il soit à nouveau repris tenaille la petite fille. Et le jour tant craint arrive, la famille n’a plus aucune ressource, la faim et la misère s’installe. Et au-dessus de tout ceci plane l’image effrayante de ce ravin, celui dans lequel on jette les corps des prisonniers exécutés.

 

Le récit est très touchant, toute en finesse, la plume de Nivaria Tejera est très délicate et poétique mais peut-être un peu trop.

Certains passages m’ont en effet beaucoup gênée, l’auteur part dans des délires qui m’ont vraiment laissée perplexe. J’ai eu beau relire ces passages plusieurs fois, me disant que je ne comprenais rien à la poésie, mais c’est resté vraiment obscur et hermétique pour moi. C’est dommage car ces passages m’ont un peu gâché l’impression d’ensemble. Surtout qu’ils sont censés exprimer les pensées de cette petite fille. Les enfants ont de l’imagination certes mais là ça me paraissait vraiment trop.

 

« Le ravin a une sentinelle qui éteint tous les yeux. Comme elle ne les arrose pas, ils se dessèchent, papa. Les chouettes, en passant, ne t’ont-elles pas ébloui ? Elles étaient en bois et elles volaient. Qui vient de rire si fort ? Maintenant les enfants n’existent plus. Depuis que la guerre a éclaté, les enfants n’existent plus sous la lune, et je ne serai jamais plus une petite fille. Vois-tu la pluie qui roule ? Quelqu’un applaudit du haut des toits de zinc, du haut de la pluie. Non, ce sont des coups de fouet, des coups de fouet et une idée fixe qui s’ouvre et se ferme comme une bouche entre les mains de grand-père. Grand-père, je comprends mieux pourquoi tu sais tant de choses, pourquoi tu as grandi et tu es devenu si vieux, avec tes rides qui te font ressembler à une grande brûlure. Attention aux ombres ! Attention ! Attention aussi au quignon de pain dur ! Personne ne s’occupe plus de tes pommes de terre. Les radis vont pourrir, les fougères aussi, et nous ne connaîtrons plus les nuits de Noël. Papa. Qui est papa ? Est-ce une fougère, est-ce une aiguille ? »

 

Ce qui fait que finalement, mon ressenti général sur ce roman est mitigé. J’ai le sentiment d’être passée à côté, que je n’ai pas su en saisir l’essence. C’est frustrant car j’ai vraiment aimé ce contraste entre la douceur du style très en accord avec l’innocence de l’enfance d’une part et la dureté de la guerre d’autre part. Tout comme j’ai aimé la façon de l’auteur de traiter ce thème, le père qui disparaît et laisse sa place au profit d’une guerre qui impose progressivement sa présence dans la vie de cette famille à travers de multiples détails. Le plus touchant est aussi l’abrupte prise de conscience de cette petite fille qui comprend bien qu’on lui vole non seulement les personnes qui lui sont chères mais aussi les plus douces années de sa vie.

Le ravin est donc un roman très beau malgré mes quelques réserves.

 

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20 août 2012 1 20 /08 /août /2012 16:33

 

cent ansMon avis :

 

Avec Cent ans de solitude, Gabriel Garcia Marquez nous conte l’histoire de la famille Buendia et du village de Macondo dont on suit l’évolution durant un siècle. Les générations se succèdent mais leur histoire se répète de façon cyclique, la famille est prisonnière d’un cercle vicieux qui les exclut du reste du monde et ne leur laisse que la solitude pour seule compagne.

Gabriel Garcia Marquez a soigneusement construit son récit afin de mettre en exergue ce schéma répétitif, tout d’abord à travers les prénoms des personnages : José Arcadio, Aureliano qui reviennent à chaque génération et auxquels sont attribuées des personnalités bien précises, les retours périodiques des gitans ou d’un nouvel élément provenant de l’extérieur, l’obstination des José Arcadio à déchiffrer les manuscrits de Melquiades, les obsessions de chacun, les retours des membres de la famille ayant tenté de quitter le village etc…

 

Gabriel Garcia Marquez nous dépeint cette fresque familiale à la façon d’un conte. Le ton et le style employé, les éléments magiques contribuent à donner l’impression que l’auteur nous raconte une histoire. Objets étonnants, tapis volants, lévitation et autres surprises parsèment le récit.

Pourtant derrière ce qui pourrait n’être qu’une fable, se dessine l’histoire de la Colombie, les querelles politiques entre conservateurs et libéraux, les nombreuses guerres civiles, les progrès techniques, l’implantation des compagnies fruitières et le massacre dit des bananeraies où l’armée tira sur des grévistes. L’obsession de Aureliano au sujet du train transportant les corps des victimes afin de les jeter à la mer se réfère à une rumeur qui circula à l’époque.

Voilà pourquoi cette œuvre est emblématique de ce que l’on appelle le réalisme magique.

 

Le thème de la solitude apparaît et est développé sous toutes ses formes possibles, à travers l’isolement du village, à travers le manque d’amour, à travers l’expérience du pouvoir lorsqu’Arcadio joue au tyran de Macondo,  à travers le repli sur soi de Aureliano chef de guerre, et des José Arcadio qui s’enferment dans leur cabinet d’étude etc…

Seule Ursula m’a semblé lutter contre cette solitude, elle qui tenait à toujours laisser la maison grande ouverte, qui utilisait tous ses sens pour ne pas laisser sa cécité l’isoler, qui a tout fait pour combattre le destin et la solitude de ses enfants.

Ce qui m’a le plus frappé, c’est cette absence d’amour. Le style neutre et la prise de distance de l’auteur ôtent au lecteur toute possibilité de ressentir des émotions et en particulier l’amour. On ne ressent aucun amour, ni des parents vers les enfants, ni des couples entre eux, ou alors il reste purement physique et souvent incestueux.

 

Pour moi Cent ans de solitude est une curiosité. Cette lecture m’a étonnée et transportée dans un autre univers, je me suis laissée bercer par cette histoire partiellement rocambolesque. Ce n’est pas un coup de cœur mais en tout cas une belle aventure.

 

Un mot sur le format : j’ai eu la chance de pouvoir lire cette œuvre au format point2 que j’ai trouvé très pratique, très léger. Seul bémol : la finesse des pages qui les rend difficile à tourner.

 

Je remercie beaucoup Livraddict ainsi que les éditions Point2 pour m’avoir accordé ce partenariat.

 

nobel

Cette lecture entre également dans le challenge des Nobel organisé par mimipinson.

 

 

 

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14 décembre 2011 3 14 /12 /décembre /2011 17:46

yocandraPrésentation de l'éditeur :

 

Publié en France en 1995, Le Néant quotidien est l’un des premiers textes à décrire la vie quotidienne à Cuba. Largement applaudi en Europe, il a fait de Zoé Valdés l’un des écrivains cubains les plus appréciés des lecteurs français et de Yocandra une figure de la résistance cubaine. 
« Elle vient d’une île qui avait voulu construire le paradis, et qui a créé l’enfer. » Baptisée Patrie à sa naissance, une jeune Cubaine renaît sous le nom de Yocandra. Son récit décrit le quotidien lourd, oppressant, et vide de La Havane, cette ville qui rampe dans la ruine depuis si longtemps que la mémoire de l’opulence s’est perdue, ou n’était-ce qu’un songe ? Au bord de la mer qui la sépare de la liberté, elle décrit la perte de l'innocence, des illusions, les ambitions dérisoires, les vocations gâchées car tout, y compris les carrières professionnelles, est assujetti au plan. Entre le blocus américain et le régime castriste, il semble qu'à Cuba, la politique n'existe que pour empêcher les gens de vivre. 
Écho à cette plongée dans le néant, Le Paradis du néant, rédigé quinze ans plus tard, est le récit de l’exil, de la nostalgie douce-amère d’un pays qu’on a rêvé de quitter, de la liberté impossible. Yocandra a quitté Cuba, par Miami, avant d’arriver à Paris. À La Havane, elle a laissé sa mère, l'homme qu'elle aime, ses livres et ses premiers poèmes. 
À Paris, où elle est venue chercher l'oubli, la liberté, elle est poursuivie par le son de la rumba, les prières de la santería, et même par un Cubain particulièrement opiniâtre appelé Fidel Raúl.

 

Mon avis :

 

Le Roman de Yocandra regroupe donc les deux romans Le néant quotidien et Le Paradis du néant où l’on suit donc Yocandra, sa vie à Cuba puis sa vie en exil.

Pour moi, cette lecture a été un grand coup de cœur et ce n’était pourtant pas gagné au départ.

 

En effet, j’ai détesté la première partie Le néant quotidien, heureusement très court comparé à la suite. J’ai trouvé le style d’une vulgarité dérangeante. Je n’ai pas réussi du tout à apprécier Yocandra que je ne voyais que comme une traînée dévergondée. Certains passages m’ont paru trop obscurs voire trop abstraits aussi, je n’arrivais plus à savoir quel personnage parlait etc…, je ne comprenais pas certains propos. Je pensais que j’aurais eu droit à une fresque de la vie quotidienne à Cuba. Alors oui, évidemment, il s’agit un peu de cela mais la façon dont c’est présenté m’a dérangée. J’en arrivais même à me dire que si elle avait une vie minable c’est qu’elle le méritait. Je n’ai pas du tout ressenti la moindre émotion. Rejet total.

J’aurais donc pu m’en tenir là mais comme il s’agissait d’un partenariat j’ai insisté et donc poursuivi ma lecture.

Bien m’en a pris !

 

J’ai adoré la deuxième partie Le Paradis du Néant. Je pense que les quinze années d’écart entre les deux textes y sont pour quelque chose. Le style vulgaire a laissé la place à un style familier et cru mais plein d’humour. J’y ai retrouvé un peu de ce qui m’avait plu chez Eric Miles Williamson dans Bienvenue à Oakland.

Je me suis enfin liée d’amitié avec Yocandra et je me suis sentie embarquée dans ses aventures. Et là de l’émotion j’en ai eu ! J’ai ri, j’ai eu peur, j’ai ressenti de la colère, de la tristesse. J’ai adoré vivre avec elle dans cet immeuble du quartier du Marais avec tous ses voisins hauts en couleur mais tellement attachants !

Et Zoé Valdés n’a pas sa langue dans sa poche. Le régime castriste en prend pour son grade, c’est un véritable cri de colère que nous livre l’auteur dans ce texte. Elle y décrit et dénonce avec férocité et rage les abus du régime, l’illusion des gauchistes occidentaux qui refusent de voir la vérité, le déchirement auquel conduit l’exil et ce terrible sentiment d’impuissance d’un peuple opprimé que tout le monde ignore et abandonne à son sort.

 

« La différence entre le capitalisme et le castrisme est la suivante : dans le capitalisme on t’encule, on t’empale et tu peux protester, faire grève, et tout le tintouin, avec l’appui systématique des syndicats … Dans le castrisme on t’empale tandis que tu applaudis et dis bravo pour qu’on te déchire les boyaux. Ah, et puis les syndicats sont les premiers à te baiser. »

 

A travers la bouche de Yocandra, elle aussi écrivain, c’est une partie de sa vie et de ses pensées que nous offre Zoé Valdés. Elle insiste beaucoup sur la condition des intellectuels et artistes cubains condamnés soit à la soumission au régime, soit à la prison, à la mort ou à l’exil. On pourrait penser que les écrivains exilés puissent librement s’exprimer. Mais ce n’est pas si facile, il y a des pressions : il ne faut pas donner une mauvaise image de la Révolution. Qu’on soit sur l’île ou en exil, le climat est à la méfiance car on est surveillé et, si on n’y prend pas garde, dénoncé.

L’île est une prison mais l’exil c’est la liberté conditionnelle avec bracelet électronique.

 

Je pourrais en dire encore plus tellement j’ai aimé ce livre.

Si vous voulez un aperçu de la vie à Cuba et de celle des cubains en exil à travers les yeux de quelqu’un qui a vécu les deux , si vous aimez la littérature engagée alors lisez ce roman.

 

Je remercie de tout cœur le site Livraddict et les Editions JC Lattès pour cette formidable découverte.

 

Cette lecture entre dans le cadre du challenge international de misss-bouquins ( que je pense avoir ainsi terminé !)

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6 novembre 2011 7 06 /11 /novembre /2011 12:50

el-sexto.jpg4ème de couverture :

 

Le jeune Gabriel est incarcéré au pénitencier El Sexto, au centre de Lima, dans le cadre de la répression des mouvements d’opposition étudiants. Là, il va rencontrer des représentants des partis politiques qui luttent contre le pouvoir despotique. Il découvre les hiérarchies de la prison, où en fonction des étages se côtoient en haut les politiques, puis les droits communs et les délinquants sexuels, et enfin, au rez-de-chaussée, les clochards. Les politiques se divisent entre partisans de l’APRA (de gauche) et communistes, considérés comme “vendus à l’étranger”.

Les droits communs font régner leur loi, distribuent la drogue et forcent les homosexuels à la prostitution. Les maîtres de cet infra-monde, Estafilade, Maravi et Rosita, l’homosexuel à la voix d’ange, luttent pour le pouvoir,  s’affrontent à mort, ce qui révèle la totale malhonnêteté des autorités légales.

 

Jose-Maria-Arguedas.jpgCe roman a été inspiré à l’auteur par son expérience de la prison politique en 1938. J. M. Arguedas avait manifesté en 1938 contre l’arrivée à Lima d’un représentant de Mussolini. Il définit El Sexto comme, à la fois, une école du vice et une école de la générosité.

Un grand classique de la littérature latino-américaine.

 

Né en 1911, José Maria Arguedas s'est suicidé en 1969 d'une balle dans la tête dans les toilettes de l'université où il enseignait. Il était l'une des figures majeures du mouvement indigéniste latino-américain, un écrivain connu pour son engagement politique et ses prises de position.

 


Mon avis :

 

Il ne faut pas lire ce roman comme on lirait n’importe quel autre roman. Celui-ci est un parfait spécimen de la littérature engagée et il faut s’y plonger en ayant bien à l’esprit le contexte politique au Pérou dans les années 30 et aussi le vécu de l’auteur.

José Maria Arguedas dénonce dans El Sexto la dictature de Benavides caché dans le roman derrière le personnage du « Général ».

 

El_Sexto_-_Lima.jpgEl Sexto était un centre pénitencier situé au cœur de Lima, il n’existe plus à présent et on trouve à son emplacement un hôtel de luxe. Une idée plutôt de mauvais goût lorsqu’on découvre avec horreur les conditions dans lesquelles étaient enfermés les prisonniers d’El Sexto.

Les prisonniers politiques y côtoient les prisonniers de droit commun selon une hiérarchie stricte. Chaque catégorie a son étage et les relations entre ces étages sont évitées au maximum. Celui qui enfreint les règles s’expose à la colère de ses co-détenus et à d’éventuelles représailles. Ce dont Gabriel, le personnage principal, fait l’expérience. Car Gabriel est, à l’instar d’une poignée d’autres prisonniers, un électron libre. Il ne s’identifie à aucun parti et passe pour un petit bourgeois idéaliste et trop sentimental.

 

On retrouve à l’intérieur de la prison une sorte de reproduction de la société péruvienne de l’époque que ce soit sur le plan politique ou sur le plan social. On trouve le tyran et ses partisans, ici Estafilade et ses sbires, et les deux principaux partis qui s’opposent : l’APRA dont la doctrine n’est pas clairement définie et est soupçonnée de marcher main dans la main avec les dirigeants mais prétend revendiquer un Pérou libre débarrassé des « gringos » qui exploitent le peuple et le laissent vivre dans la misère, et le parti communiste qui souhaite lui aussi libérer le peuple de l’oppression impérialiste mais qui est accusé par les apristes d’œuvrer pour le compte d’autres impérialistes étrangers que sont les russes.

Le roman s’attarde donc sur les conflits entre les deux partis mais montre en même temps leur possible entente face à un objectif commun : éliminer le tyran. Je dis bien « possible entente » car ces deux forces en présence peuvent aussi malheureusement se neutraliser l’une l’autre. La solution peut alors venir d’ailleurs.

 

En lisant El Sexto, on est nous aussi enfermé dans cette prison. J’ai suffoqué en même temps que ces occupants et été dégoûtée par certaines scènes surtout quand on réalise que c’est du vécu et que ça se passait donc réellement comme ça. On assiste à la déchéance totale de l’être humain, de sa réduction à l’état de bête et même pire encore si c’est possible. J’ai été révoltée par tant d’injustice, par le cas de cet homme emprisonné uniquement par jalousie, de ce petit garçon accusé à tort de vol par sa patronne et de me rendre compte à quel point l’arbitraire règne. Les « autorités carcérales » ferment les yeux sur tout ce qui se passe à l’intérieur, excepté quelques gardes. Ouf ! Un soupçon d’humanité dans cet enfer !

 

Je ne m’amuserai pas à critiquer le style ni à étudier les personnages car ce n’est vraiment pas là le plus important dans ce roman. Je l’ai lu comme j’aurais lu le J’accuse de Zola. El Sexto est un cri de révolte poignant. Ignoré à sa sortie par les critiques et les intellectuels, il a circulé au sein de la population et est devenu un symbole de la littérature péruvienne et indéniablement un lieu de mémoire du patrimoine culturel péruvien.

Moi qui ne connaissait absolument rien à l’Histoire du Pérou, j’ai beaucoup appris grâce à ce livre.

A découvrir donc absolument.

 

Je remercie infiniment le site Newsbook et les Editions Métailié pour m'avoir offert ce partenariat.

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4 septembre 2011 7 04 /09 /septembre /2011 14:35

MalarrosaQuatrième de couverture :

 

Elle devait s’appeler Malvarrosa mais, à cause d’une erreur de l’officier de l’état civil ou parce que son écervelé de père était trop soûl en allant la déclarer, elle finit par s’appeler Malarrosa.
Cette petite fille marquée par le destin dès sa naissance accompagne son père dans les bouges où se déroulent ses parties de cartes et parcourt avec lui les hameaux environnants au gré des rencontres pugilistiques entre Oliverio Trébol et les “champions” locaux.
Elle vit au milieu de personnages hauts en couleur, campés avec une truculence toujours teintée de tendresse : Saladino, père irresponsable et joueur poursuivi par la guigne, Oliverio Trébol dit Tristesburnes, le gros bras au cœur tendre, sans oublier Isolina del Carmen Orozco Valverde, l’institutrice d’âge canonique qui ne désespère pas de ramener tout ce beau monde dans le droit chemin.
Au fil des mois, ses vêtements masculins ne peuvent plus dissimuler les rondeurs naissantes de Malarrosa. Alors, avec une lucidité et une détermination extraordinaires, ce sera elle qui, pour la première fois, décidera de son destin.
Fidèle à sa vocation de chantre du désert et de l’épopée du salpêtre, Hernán Rivera Letelier a choisi pour toile de fond l’agonie de Yungay, un de ces innombrables villages du Nord qui ont disparu comme autant de mirages.

 

Mon avis :

 

Avec Malarrosa de Hernan Rivera Letelier, on plonge au cœur des villages miniers du désert d’Atacama au Chili riche en salpêtre.

Le salpêtre entre dans la composition de la poudre et des explosifs, abondamment utilisé au XIXème et au début du XXème, son emploi se fait plus rare au lendemain de la première guerre. La chute de la demande en salpêtre conduisent à la fermeture progressive des mines et parallèlement à la disparition et l’abandon des communes ouvrières.

On découvre dans ce roman la vie difficile des ouvriers des mines de salpêtre, on assiste à la vie puis à la mort d’un de ces villages miniers, victime des contraintes naturelles extrêmes et du cours de l’Histoire.

On accompagne ainsi Malarrosa, fille d’un de ces ouvriers victime de la fermeture de sa mine. Privée de mère, elle suit son père dans les bordels où ce dernier ne pense qu’à jouer le peu d’économies qu’ils ont et à assister à des combats de boxe clandestins.

Je pensais lire le récit de la vie entière de Malarrosa mais le roman se cantonne à la période de ses 13 ans avec quelques évocations de son enfance. Le reste de sa vie n’est que superficiellement évoqué (présenté sous forme de simples rumeurs) dans le tout dernier chapitre (qui ne fait qu’une page).

J’ai donc été déçue, je m’attendais à autre chose. En fait, il ne se passe pas grand chose dans ce roman, les évènements sont relativement insignifiants (d’un autre côté, comment pourrait-il en être autrement au fin fond du désert ?) et j’ai parfois eu l’impression de me retrouver en plein western. Tous les éléments rappelant le western sont réunis : le désert, le bordel qui évoque le saloon où on joue au poker, où ceux qui gagnent trop se font descendre, où les filles se déhanchent avec leur boa en plumes, le policier du village qui évoque le sheriff, sans oublier le croque-mort fidèle à sa caricature : vêtu de noir, aux allures de vautour etc…

L’auteur nous présente également un aperçu de la politique du pays à l’époque, il dénonce les épisodes très durs des massacres des ouvriers de San Gregorio qui avaient voulu se révolter contre la fermeture de leur mine et les exactions commises par l’armée et approuvées par les dirigeants au pouvoir.

 

Le roman est trop court pour qu’on puisse s’attacher aux personnages malgré les figures sympathiques de Oliverio Trebol et Morgano, et j’ai trouvé ça dommage. L’histoire en elle-même m’a paru trop fade pour m’émouvoir et, malgré le nombre restreint de pages, j’ai eu beaucoup de difficulté à avancer dans ma lecture. Je lisais une dizaine de lignes et reposais le livre. Ma lecture s’est donc étalée sur plus d’une semaine alors qu’elle n’aurait du me prendre qu’à peine 2 jours. Le style est pourtant simple, le langage courant. J’ai apprécié les passages descriptifs sur le soleil et son ardeur, sur le vent et le désert. J’ai trouvé ces passages très bien écrits, avec de jolies métaphores, l’ensemble est assez poétique. Les oiseaux sont un élément récurrent tout au long du récit. Tout comme les oiseaux dans leur cage, les hommes sont prisonniers du désert :

« Voilà ce que le désert était pour eux - et pour tous - une sorte de prison ouverte. »

La figure du mirage revient souvent aussi symbolisant la disparition prochaine du village.

Au final, une lecture qui ne m’a pas forcément déplu, j’ai beaucoup apprécié certains passages …trop rares hélas, mais je ne l’ai pas trouvée exaltante non plus.

Je souligne enfin que l’objet livre en lui-même est très beau avec une magnifique couverture ( tout comme Malarrosa j’adore aussi les oiseaux).

 

http://newsbook.fr/wp-content/uploads/2011/04/Logo-Partenariats-News-Book.png

 

Je remercie le site Newsbook et les Editions Métailié de m’avoir offert ce partenariat.

 

 

 

Cette lecture entre dans le cadre du challenge international de misss-bouquins (7ème escale).

 

D'autres avis sur ce livre chez : Ellcrys, Nina, Poisonauchocolat

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21 juillet 2011 4 21 /07 /juillet /2011 18:56

tunnelsabatopointsseuil1995.jpgJuan Pablo Castel est un artiste peintre argentin renommé.  Misanthrope et nihiliste, il rejette le monde qui l’entoure et se sent incompris, seul.

Pourtant, lors d’un Salon à Buenos Aires où sont exposées ses œuvres, il remarque alors une jeune femme qui semble intriguée par un point de détail sur une de ses toiles, détail auquel personne n’avait jusqu’alors fait attention.

Enthousiasmé de savoir qu’enfin une personne puisse le comprendre véritablement, il fait de Maria, la jeune femme, une obsession et met tout en œuvre pour la retrouver.

Il la retrouvera, une histoire d’amour naîtra et pourtant Juan Pablo tuera Maria.

C’est de sa prison qu’il entreprend son récit et tente de justifier son acte dans l’espoir de trouver un lecteur qui le comprendra.

 

Mon avis :

 

J’ai acheté ce livre par hasard, la quatrième de couverture m’ayant intriguée et je remercie le destin de m’avoir permis cette découverte.

Je ne connaissais pas du tout ce roman, et pourtant Le tunnel d’Ernesto Sàbato a une renommée mondiale et a été encensé par de grands écrivains tels que Albert Camus ou encore Graham Greene.

Il ne s’agit pas d’un roman policier mais d’un roman noir, très noir. C’est le récit d’une passion destructrice, l’histoire d’un homme rongé par la solitude et par un autre démon : la jalousie.

Juan Pablo réfléchit et analyse tout, sans arrêt. Le moindre geste, la moindre phrase, l’intonation de cette phrase, tout est passé à la loupe.

Et cette tendance s’accentue d’autant plus lorsqu’il apprend que Maria est mariée et qu’elle ne lui en avait rien dit.

La jalousie de Juan Pablo prend des dimensions effrayantes à la limite du harcèlement. Tout ce que Maria peut dire ou faire est interprété dans un unique sens : elle le trompe. Assailli de doutes, son orgueil l’amène à chaque fois à la même conclusion. Il veut à tout prix avoir raison et fait tout pour en avoir la preuve.

J’ai parlé d’orgueil et voilà le fond du problème. Juan Pablo est vaniteux, il n’aime personne, personne ne trouve grâce à ses yeux excepté Maria et pourquoi ? Parce qu’elle a pu saisir le sens d’un détail de son tableau. A partir de là, Juan Pablo est persuadé que Maria est son âme sœur mais surtout son autre Moi. C’est lui-même qu’il cherche et aime à travers elle. Il en fait sa bouée de secours, celle qui le sort de sa solitude.

Le personnage de Maria reste quant à lui insaisissable. On ne sait rien de sa personnalité, on ne saura jamais si elle a véritablement trompé Juan Pablo ou non. Ses réactions et son comportement sont difficiles à interpréter d’où toute l’ambigüité. Elle semble désemparée face à ces attaques mais en même temps elle reste si sereine qu’on comprend l’agacement du narrateur.

Tout le récit est construit autour du narrateur puisque c’est lui qui parle, il annonce son intention à l’objectivité mais c’est illusoire. Le lecteur n’a que son point de vue à lui et, quelque part, il devient même son complice.

J’avoue avoir été choquée parfois de me sentir aussi proche de ce narrateur. Etant moi-même sujette à la jalousie (pas dans de telles proportions heureusement), ayant moi-même cette tendance à interpréter toujours dans le sens négatif des détails pourtant insignifiants et à me faire tout un film à partir de rien, j’ai été effrayée de me reconnaître ainsi en lui.

Juan Pablo a raconté son histoire dans l’espoir qu’un lecteur le comprenne. L’ai-je compris ?

Je crois que oui et ça m’en effraie d’autant plus. Je l’ai pourtant moi-même jugé à la limite de la folie furieuse mais je l’ai compris.

J’ai aussi très bien compris cette métaphore du tunnel. Ce tunnel dans lequel il avance, isolé du reste du monde, ce monde qui s’amuse et avec lequel il ne peut interagir sauf à de fugaces exceptions comme avec Maria. Jamais il n’aura connu avec elle d’instants de parfaite osmose, de fusion, ces instants qui font qu’une relation amoureuse est pleine et entière.

Il a cru que Maria le sortirait de sa solitude mais elle ne l’y a enfoncé que davantage. C’est pour cela qu’il l’a tuée, parce qu’elle l’avait laissé seul.

Ce thème de la solitude est le thème central de cette œuvre. L’auteur y est particulièrement attaché. Grand scientifique avant d’avoir embrassé la carrière littéraire, il est conscient des dangers de l’évolution technologique et de la transformation du monde en un monde froid, matérialiste et individualiste. Il veut dénoncer cette solitude de l’homme et en particulier celle de l’artiste. A noter qu’à l’époque de la rédaction du Tunnel, l’Argentine est en proie à des violences endémiques et connaît la dictature, notamment celle du général Peron qui, il faut le souligner, avait parmi ces thèmes de campagne : «  Des espadrilles oui, des livres non ». Tout un programme … Et on comprend d’autant plus le désarroi et le sentiment de  solitude de l’auteur.

Ce roman m’a touché à plus d’un titre comme j’ai déjà pu le dire. Il est remarquablement écrit. Le sentiment de jalousie y est décortiqué magnifiquement, Ernesto Sàbato a su mettre en mots des sensations qui me sont si familières.

Bref, cette lecture fut pour moi un gros coup de cœur. Je renouerai très certainement avec cet auteur pour ces deux autres romans L’ange des ténèbres et Héros et tombes. Romans qui avec celui-ci forment la trilogie argentine.

J’ai critiqué ce livre en étant moi-même non objective puisque je suis une jalouse et que je me sens pleinement concernée par cette sensation de solitude et de mise à l’écart par rapport au reste du monde. J’aimerais beaucoup avoir le point de vue de personnes différentes, non sujettes à la jalousie.

140 pages c’est très court alors lisez-le et n’hésitez pas à venir exprimer votre avis quel qu’il soit.

 

Cette lecture entre dans le cadre du Challenge international catégorie « Tour du monde en 10 livres » organisé par Misss-bouquins . Pour plus d'infos c'est ici .

Donc première escale en Argentine, pour la suite du voyage j’hésite encore quant à ma prochaine destination…

 

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